On trouve des gâteaux aux pruneaux dans toute la Suisse, mais c'est particulièrement dans les cantons protestants de Neuchâtel, Vaud, Genève et le district fribourgeois du Lac qu'il est associé au jeûne fédéral. Datant du Moyen-Âge, la tradition du jeûne avait pour but de faire pénitence. Il n'existait pas de jour fixe et sa célébration étaient motivée par diverses circonstances : guerres, mauvaises récoltes, épidémies, etc...On prononçait donc un jour de contritions, de prières et de procession, parfois plusieurs fois au cours de l'année, afin de s'attirer les grâces divines. En 1639, la Diète protestante décrète l’introduction d’un jour de jeûne annuel. La Diète catholique en fait de même en 1643. Mais ça n'est qu'en 1832 qu'il est décidé d'une date commune pour toute la Suisse, en l'occurence le troisième dimanche de septembre. Seul le canton de Genève, qui décidément aime bien faire les choses à sa sauce, continue de le fêter le jeudi suivant le premier dimanche de septembre. En revanche, nul ne sait vraiment pourquoi l'on a associé le gâteau aux pruneaux à cette célébration. Certains arguent que les familles, trop occupées à l'église et n'ayant le droit de ne manger qu'au coucher du soleil, préparaient un repas léger la veille, mais aucun écrit historique n'a vraiment pu étayer cette théorie. Quoi qu'il en soit, et c'est encore le cas aujourd'hui, ils constituaient parfois un souper à part entière.
Un gâteau en Suisse, c'est une tarte donc une base de pâte avec des fruits dessus. Quant aux quetsches de nos amis français, n'espérez pas trouver ce terme sous nos latitudes. Plus petits, mais plus goûteux, les pruneaux de Chézard ont la faveur de mon Papa. Mais les fellenberg, plus gros et plus répandus, iront tout aussi bien.
Depuis toute petite, j'ai mangé des gâteaux aux fruits à toute les sauces, que ce soit en dessert ou en complément d'une soupe ou d'une salade pour le repas du soir : à la rhubarbe au printemps, aux abricots en été, aux pruneaux en automne, aux pommes ou aux poires en hiver. En Suisse quand on veut un peu de sucré, on fait un gâteau aux fruits ; les desserts plus élaborés ne sont pas légions dans les familles. Ceci est dû au fait que posséder un four était un luxe à l'époque. Souvent il n'y avait qu'un four à bois par village et le chauffer demandait du temps. On cuisait le pain environ une fois par semaine et ensuite les gens apportaient leur gâteau à cuire à chaleur descendante pendant que le four refroidissait pour ne pas gâcher cette précieuse source d'énergie. Tous les desserts n'étaient pas adaptés à ce mode de cuisson, surtout que le beurre et le sucre coûtaient cher. De temps en temps accompagnés d'une liaison à base d'oeufs et de crème appelé "guélon", le gâteau aux pruneaux fait exception, car le jus rendu par les fruits suffis amplement. Seule condition pour un gâteau aux pruneaux réussis : avoir des fruits bien mûrs. En rade de pruneaux, j'ai testé une fois avec ceux encore verts du supermarché et le résultat n'aurait clairement pas suffi à me faire pardonner mes péchés.
(Pour un gâteau de 32 cm de diamètre)
Pour la pâte
200 g de farine
100 g de beurre
1 c. à c. de sel
1 c. à s. de sucre
1 dl d'eau
850 g de pruneaux
Mélanger la farine, le sucre et le sel. Incorporer le beurre en petits cubes et sabler le tout avec les doigts pour incorporer la matière grasse. Ajouter l'eau, mélanger rapidement et former une boule. Bouler et laisser reposer environ 30 minutes. Fleurer le plan de travail et étaler la pâte uniformément. La disposer dans un moule à tarte chemisé. Piquer le fond avec une fourchette et préchauffer le four à 180° chaleur tournante.
Laver les pruneaux. Les couper en deux, retirer le noyau. Inciser le hauts de chaque demi-pruneaux avec un ou deux fentes. Disposer les moitiés de pruneaux sur la pâte en les faisant se chevaucher. S'ils sont vraiment très mûrs, vous pouvez préalablement saupoudrer la pâte d'un peu de noisettes ou d'amandes moulues. Éventuellement saupoudrer d'un peu de sucre et faire cuire 30 à 40 minutes dans le bas du four.
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